À partir d’un admirable travail documentaire, Jade Herbulot et Julie Bertin, artistes associées au Grand R, mettent en scène des destins individuels et retracent ainsi une histoire de la persécution des juifs par la République française, entre crapulerie
Les suppliques désignent les centaines de lettres envoyées pendant la Seconde Guerre mondiale par les membres de familles juives, françaises ou étrangères, à l’administration du régime de Vichy dans l’espoir que leur requête soit entendue. Ces milliers de lettres, découvertes par l’historien Laurent Joly, constituent un matériau exceptionnel et le point de départ de cette « fiction documentée ». C’est dans ce contexte que s’inscrit cette création, faisant partie d’une constellation de projets (film documentaire, œuvre numérique, œuvre radiophonique et création théâtrale) en partenariat avec France Télévisions et France Culture.
Chaque lettre renferme des fragments de vie familiale qui sont convoqués sur scène. Pour nous plonger dans le secret de ces familles, Julie Bertin et Jade Herbulot inventent une scénographie pour raconter l’intime. Les spectateurs sont au plus près des quatre comédiens exceptionnels : Gilles Privat, Marie Bunel, Salomé Ayache et Pascal Cesari. Sous le regard de Thierry Thieû Niang, ancien complice de Patrice Chéreau, des passages chorégraphiés enveloppent ces histoires saisissantes pour raconter l’intime quand les mots ne suffisent plus. Ensemble, ils nous offrent un spectacle délicat, poignant et nécessaire qui traduit un héritage français et permet d’appréhender le présent en tenant à distance les discours de haine.